Les vitraux de la maison Lobin

Les vitraux de la Chapelle des Carmes ont été créés et fabriqués par la célèbre maison Lobin de Tours en 1865. Pendant près de 80 ans, sur 3 générations, la famille Lobin va s'illustrer dans la création de vitraux pour les églises de Tours, dans l'Indre-et-Loire et dans de nombreux départements français, mais aussi en Angleterre, en Espagne, en Suisse et même au Brésil.

 

A la fin des années 1840, l'architecte Eugène Viollet-le-Duc (1814-1879), fondateur du Service des Monuments Historiques, recommande la candidature de Julien-Léopold Lobin (1814-1864), jeune verrier tourangeau, pour restaurer les vitraux de la cathédrale Saint Gatien de Tours.

 

C'est un artiste peintre de talent et spécialiste dans les raccords de peinture sur verre. La beauté des vitraux de Tours en témoigne.

 

A cette époque, le patrimoine vitré de la France était dans un état lamentable. Les XVIème et XVIIème siècles avaient abandonné le vitrail gothique. On ne trouvait plus de maîtres verriers pour restaurer les verrières médiévales.

 

Julien-Léopold Lobin avait étudié la peinture à Paris, à Rome et à Sienne. Il était peintre d'Histoire.

 

Ses premiers vitraux dans l'église de Saint-Pierre-Ville lui valent une médaille d'encouragement, le soutien financier d'un banquier et de Ernest Mame, responsable de la célèbre imprimerie de Tours.

 

Un atelier peut ouvrir le 1er décembre 1847, 12 rue des Ursulines à Tours. Julien-Léopold Lobin prend la tête de l'entreprise et reçoit des commandes de vitraux pour 65 nouvelles églises dans le diocèse d'Indre-et-Loire. L'atelier devient un lieu de formation pour de grands maîtres verriers de l'époque et pour Lucien-Léopold, son fils (1837-1892). La peinture sur verre est une nouveauté au XIXème siècle.

 

Que se passe-t-il chez les Lobin en 1865, lors de la pose des vitraux de la Chapelle des Carmes de Rennes ?

 

Le père, JulienLéopold, est mort en 1864. Le fils, Lucien-Léopold, a pris la succession ; 70 personnes travaillent à l'atelier : peintres, vitriers, employés au four, préparateurs des couleurs.

 

Des vitraux neufs signés " Lobin - Tours " se trouvent déjà dans 650 églises, auxquels il faut ajouter les vitraux anciens restaurés.

 

C'est l'époque de la renaissance du vitrail. Lucien-Léopold, dessinateur dans l'âme, peint sur verre avec talent à partir de modèles vivants, car le problème est de trouver des modèles de visages sans recopier le personnage d'une verrière voisine.

 

L'Adoration des Bergers de l'église de Saint-Pierre-des-Corps représente les portraits des membres de la famille Lobin.

 

La commande des vitraux de la Chapelle des Carmes de Rennes a probablement été faite au père Julien-Léopold Lobin (mort en 1864) et le travail a été réalisé (ou achevé) par le fils Lucien-Léopold. Les vitraux Lobin de la Chapelle des Carmes portent tous la date de 1865.

 

Le chanoine Brune et la Maison Lobin (avec tous les partisans du néo-gothique) se sont soumis aux règles stylistiques et théologiques des maîtres verriers du XIIIème siècle.

 

Lucien-Léopold Lobin ne fera pas une imitation de l'art médiéval, mais tout en respectant les données historiques de la scène à représenter et les données archéologiques de l'Eglise, il s'inspirera des modèles de la peinture italienne de la Renaissance.

 

Nous ne connaissons rien de la technique de la famille Lobin. Leur travail se rapproche du rendu naturel de la peinture.

 

Le vitrail Lobin se reconnaît à la finesse et à la clarté du dessin, aux nuances des couleurs. Une véritable BD avant l'heure.

 

Le vitrail néo-gothique marque le retour de la couleur. L'imitation des Anciens exigeait une technique très maîtrisée.

 

La Seconde Guerre mondiale a détruit les hautes verrières de la nef de la Chapelle des Carmes, et quelques oculi de la rosace.

 

Les vitraux du chœur, les oculi des bas-côtés et de la rose (en partie) ont tenu bon lors des bombardements du 17 juin 1940 et du 8 mars 1943. Aujourd'hui, ce sont les seuls vitraux Lobin à Rennes.

 

Le célèbre vitrail Lobin de l'église Saint-Sauveur, représentant la ville de Rennes sauvée des Anglais en 1357, a été détruit pendant la Seconde Guerre mondiale.

 

En Ille-et-Vilaine, il y a plusieurs vitraux Lobin toujours visibles dans l'église Saint-Marse de Bais. Dans l'église Saint-Pierre de Pleurtuit se trouve un vitrail Lobin à 2 lancettes représentant la vie de Saint-Joseph et daté de 1878, ainsi qu'un ensemble de 9 verrières à personnages, datées de 1878. Dans l'église de Mellac, près de Quimperlé, plusieurs verrières sont signées Lobin 1863 et 1887.

 


 

 En 1865, les vitraux Lobin ont une grande réputation ; ils sont présentés aux expositions nationales et universelles.

 

Madame Louise-Anne Lobin (21 ans), l'épouse de Lucien-Léopold, organise des soirées musicales dans l'atelier rue des Ursulines pour présenter les œuvres de son mari aux notables, aux amateurs d'art, aux membres du clergé. Pendant ce temps, Lucien-Léopold pose ses vitraux dans de nouvelles régions : Paris, Lyon, le Jura.

 

Il développe le vitrail civil avec des allégories (les Saisons, l'Agriculture …). Ce style de vitrail commence à être demandé dans les maisons bourgeoises comme l'hôtel particulier du 1, boulevard Béranger au centre de Tours.

 

Pendant 12 années, Lucien-Léopold Lobin obtient tous les chantiers de vitrail décoratif de l'Indre-et-Loire.

 

Mais … deux ouvriers de l'entreprise Lobin créent leur propre atelier de vitrail à quelques mètres, au 3 rue des Ursulines, en pratiquant des prix attractifs.

 

A sa mort, en septembre 1892, Lucien-Léopold Lobin laisse une œuvre importante avec des difficultés financières. Il aura défendu le caractère artistique des maîtres verriers qui seront désormais admis au Salon des Champs-Elysées.

 

Les enfants de Lucien-Léopold vont se diviser et l'atelier sera repris par Joseph-Prosper Florence qui mettra fin à l'entreprise en 1904.

 

Cette histoire est liée aux vitraux de la Chapelle des Carmes de Rennes.